Nora

Mali: Sidi Elmehdi AG ALBAKA, ce jeune Tamasheq de Kidal qui milite pour un pays uni et indivisible!

Quand il nous arrive souvent de constater dans nos réflexions que l’Afrique peine à se redresser économiquement et socialement à cause des conflits par ci et là; rencontrer parfois des gens qui nourrissent encore l’ESPOIR d’une Afrique meilleure, redonne de la joie au cœur et du courage.  Parmi ces derniers, c’est souvent des jeunes à qui la bêtise humaine a tout pris (soit la joie de vivre, soit un avenir; soit un proche parent ou un citoyen tout simplement etc), qui rêvent dans un esprit positif que c’est encore possible. Oui, c’est encore possible pour nos pays africains, d’aller de l’avant. Même si cela doit prendre du temps, l’assurance d’un lendemain meilleur est inévitable car dans les communautés se trouvent heureusement au moins un jeune patriote ou panafricain dont le leitmotiv est « paix et justice sociale ».

Au Mali, j’en ai croisé un, épris de l’amour pour son pays, qui malgré les risques, s’engage quand même pour un Mali uni et indivisible. Lui, c’est Sidi Elmehdi AG ALBAKA qu’il se nomme. Cet article en effet, est le produit d’un interview que nous lui avons accordé relatif à la situation socio-politique actuelle  du Mali en nous appesantissant plus sur Kidal, la ville qui semble être encore sous le contrôle des rebelles malgré la présence des forces onusiennes, de la MUNISMA et des soldats français. Sidi a créé dans un contexte inédit une association de jeunes dénommée « Mali Debout »  le 08 Juillet 2013, au camp 1 de Kidal. Pourquoi cette association? Quelles actions mène t-elle? Quelle vision Sidi a pour le Mali? Voilà autant de questions auxquelles ce dernier répond dans cet entretien!

crédit photo: sidi
crédit photo: sidi

 

1- Pourquoi Mali Debout?

Sidi: Créée le 08 Juillet 2013 au camp 1 de kidal, Mali Debout a pour but de reconstruire tout ce qui a été détruit par les forces du mal. En rappel, les FAMA (Forces Armées Maliennes) sont arrivées à kidal le 05 Juillet et pour les accueillir, je me suis fais accompagner de femmes et de jeunes une soixantaine . Et juste après leur installation dans le camp, les rebelles du MNLA nous ont agressés physiquement ont pris nos motos, ont frappé nos femmes et enfants. La seule solution était de chercher refuge au camp et le lendemain c’est des centaines de rebelles qui attendaient à la porte espérant nous voir sortir pour nous luncher voilà ce qui nous à couter 22 jours au camp 1 de kidal. 

 2-      Quels impacts depuis la création de votre association à ce jour ?!

Sidi: A ce jour je reconnais  que grâce à nos activités les populations maliennes à Kidal sont mieux organisées en ce qui concerne la défense des intérêts de notre pays: la coopération avec les forces de sécurités pour dénoncer  les islamistes.

3-      Quelles sont les perspectives pour Mali Débout ?

Sidi: Nous allons continuer à soutenir notre pays jusqu’à la fin de la crise et participer à sa reconstruction.

4-       Qui est en réalité Sidi Elmehdi ?!!   

Sidi: Sidi Elmehdi est un jeune tamasheq (touareg) malien de kidal, bientôt 28 ans, animateur de radio, responsable de l’association de jeunes à kidal nommée « Mali debout » ; qui lutte depuis le 05 Juillet date de l’arrivée des Fama à kidal. Et qui a été un acteur principal dans la réussite des élections présidentielles et législatives dernières à Kidal.

crédit photo: sidi
crédit photo: sidi

5-  Pourquoi Kidal ne semble t-il pas être libérée comme les autres régions du Mali ?

Sidi: kidal est très loin d’être libérée car en son sein il y a les rebelles du MNLA qui sont armées et les rebelles du haut conseil pour l’unité de l’Azawad. Vous imaginez le drapeau du Mali ne peut pas être brandi partout à Kidal.

6- Qu’est ce qu’il faut pour rétablir l’ordre et la quiétude à Kidal ?

Sidi: Pour rétablir l’ordre dans un premier temps : désarmer et cantonner les rebelles hors de la ville, ensuite laisser l’armée malienne et la MUNISMA assurer la sécurité des postes d’entrée de la ville ; tertio organiser des patrouilles mixtes à l’intérieur comme à l’extérieure de kidal et enfin parler aux populations de la paix, de l’éducation et de la santé.

7– Pensez vous que parler de l’Azawad est une réalité ?

Sidi: L’Azawad est une cuvette qui sépare la région de Tombouctou et la Mauritanie ; en aucun cas les régions de Gao et de Kidal ne peuvent être concernées  de loin ou de près par cet adjectif.

8- Quel avenir pour le Mali ? (Vos vœux pour 2014)

 Sidi: Pour 2014 je souhaite un Mali uni de kayes à kidal; une armée forte qui assure Seule et Bien la sécurité de son pays. Beaucoup d’emplois pour les jeunes. Pas de violences sur les femmes. Merci

C’est nous plutôt qui vous remercions! Sincèrement « TENEMERT/N NI CE » (merci en tamasheq et en bambara) pour avoir accepté répondre à nos questions et nous vous souhaitons vivement que 2014 soit une année de libération totale pour le Mali. Nous vous souhaitons aussi beaucoup de courage pour votre association. La mission n’est pas facile certes, mais nous croyons que vous y arriverez avec la disponibilité et l’engagement des vôtres; car l’Afrique doit bouger et ne doit plus se laisser retarder par des crises inutiles qui ternissent son image.

A tous ceux que les crises socio-politiques ou les conflits ouverts frappent actuellement, nous disons courage et souhaitons une année 2014 plus stable!

 as-salām ʻaláykum/Que la paix soit sur vous /السلام عليكم


Mandela : un hommage vu sous 5 angles !

Pour rendre d’une manière symbolique leur hommage à Nelson Mandela, cinq jeunes blogueurs dont deux blogueuses ont produit ici un article collaboratif en la mémoire de ce grand personnage de l’histoire et qui vient d’entrer dans l’histoire!  Eux, ils n’étaient pas à Soweto hier 10 décembre 2013, pour rendre leur hommage; mais ils ont trouvé mieux: un hommage via le blog! En cinq différents angles ils nous présentent leur réflexion ...

 Mandela : un hommage à Winnie !

credit photo:biography.com
Credit photo : biography.com

La blogueuse Fatoumata, dans sa réflexion, a trouvé important de laisser un hommage mérité à Winnie , celle qu’elle appelle la mère de la nation arc-en-ciel!

« 5 décembre 2013 : Une date marquante, pour les Sud-Africains et pour tous les Africains. L’icône de la lutte pour la liberté des droits de l’homme noir, celui qui a pu faire cesser la pratique de la ségrégation entre races dans un même pays, s’en est allé, dignement. Ami Koita, la grande griotte malienne ne dit-elle pas dans sa chanson en hommage à Hampâté Bah  que « même la mort meurt » ? Eh oui, nul n’est éternel, même pas Madiba. Beaucoup clament haut et fort de ne pas l’oublier. Moi aussi, je n’oublierai point cet homme.

Je parlerai certainement des milliers de fois de sa formidable philosophie de la vie. Mais je parlerai aussi de Winnie Mandela. Oui Winnie ! Elle est entrée elle aussi dans l’histoire en combattant pour la libération de son mari durant les 27 longues années d’emprisonnement de Nelson Mandela. Engagée pour Mandela, elle épouse aussi bien l’homme que la cause. Elle a été la mère de la nation arc-en-ciel avant de devenir une bête noire, dont les crimes et l’extrémisme pourraient nuire à l’aura du leader de l’ANC. Malgré tout, je crois qu’elle a joué un rôle important dans la vie de ce grand homme, voilà pourquoi je n’oublierai pas Winnie Mandela »

 

Mandela : l’homme et la compagne

crédit photo:letemps.fr
Crédit photo : 20minutes.fr

Pour le blogueur  Boukary, c’est le lieu de mener une réflexion sur cette réciprocité qui a permis à Mandela de tenir. Comme il le dit si bien « à côté d’un homme fort, engagé, courageux, il faut une femme forte, engagée et patiente »

« Dans sa recherche de l’acquisition et de la préservation de la liberté, de la justice et de l’égalité entre tous les hommes vivants sur le sol de son pays, Mandela, l’homme que je ne considère jamais comme un saint, mais comme un homme prédestiné, a toujours su ce qu’il voulait, en se fixant des objectifs nobles et s’est battu pour les atteindre (…). Dans ce combat de tous les jours qu’il s’est donné comme raison de son existence, l’homme a toujours su mesurer l’ampleur de ce qui l’attendait pour se donner quotidiennement la force qui lui permet de mener son combat.

Il a décidé, il l’a fait, mais simplement ? Non, Mandela, dans son combat, a été patient, humble, infatigable, persévérant, tenace,  courageux et engagé ! Oui, nous devons reconnaître à Mandela, toutes les qualités d’un combattant de guerre sans arme à la main, surtout, l’intelligence. Pouvait-il continuer et aboutir son combat seul ? Non, il a été accompagné, accompagné par des hommes et des femmes. Mais, maintenir stable son idéal engagement et son courage, Mandela le doit à sa femme, Winnie qui a compris et partagé les raisons du combat de son compagnon.

Ainsi, à côté d’un homme fort, engagé, courageux, il faut une femme forte, engagée et patiente ».

 

Mandela : la réussite d’une action collective

crédit photo:le temps.fr
Crédit photo: le temps.fr

Pour le blogueur Boubacar Mandela ne saurait ce qu’il a été sans ces hommes et femmes qui l’ont soutenu et qui se sont sacrifiés tout comme lui pour une nouvelle Afrique du Sud. Voici donc ce qu’il nous dit:

« Comme à sa libération de la tristement célèbre prison de Robben Island, Nelson Mandela tient la vedette dans la presse. Mais à la place des sourires et de l’accueil triomphal qui lui a été réservé à sa libération, les larmes ont perlé sur les joues, au coin des yeux. Tous ou presque ont été sous le choc. Mandela, héros de la lutte anti-apartheid, a fini par déposer les armes au pied de l’inévitable : la mort.

Pour mémoire, Nelson Mandela, avocat, membre du Congrès national africain, avait dit « adieu à la liberté » le 5 août 1962, jour où, trahi, il a été arrêté près de Horwick. C’est en juin 1952 que ses démêlés avec la justice démarrent. Il avait alors organisé une campagne de désobéissance civile et contrevenu aux lois qui interdisaient aux Noirs d’être en zone blanche le soir. Des lois qui reposaient sur la ségrégation, destinées à dénier au peuple noir tout droit à la liberté politique et individuelle. Des lois qui offensaient le peuple noir dans sa dignité, dans son honnêteté. Des lois qui vantaient la suprématie blanche : les Afrikaners.  A l’époque, l’Afrique du Sud était donc un pays compartimenté, morcelé, où les disparités sociales sont énormes. Voilà entre autres les raisons qui ont poussé Mandela et ses camarades sur le chemin de la lutte….

C’est cette volonté de Mandela de voir « une société libre et démocratique dans laquelle tous vivraient en harmonie et avec des chances égales » qui a triomphé après qu’il a passé 27 ans en prison.

Aussi est-il difficile de parler de Mandela sans évoquer à ses compagnons de lutte, car le retour du pouvoir entre les mains du peuple noir en Afrique du Sud est le fruit d’un combat collectif dans lequel beaucoup ont péri, exilé, emprisonné. Je pense notamment à Walter Sisulu, secrétaire général de l’ANC au moment de leur arrestation ; à Ahmed Kathrada, ce fils d’immigrés asiatiques, entré en contact avec Sisulu et Mandela en 1948, avec lesquels il plongea dans la clandestinité après l’interdiction de l’ANC en 1963. Il y aussi Govan MBeki, Raymond Mhlaba, Dennis Golgberg, Jeff Masemola, Wilton Mkwayi. Mais il y a un autre nom qui fera frémir d’indignation les « nost-apartheid » (les nostalgiques de l’apartheid) : Desmond Tutu, archevêque, couronné par le prix Nobel de la paix en 1984. Tutu est connu pour ses messages de paix et de non-violence, ses flèches contre l’apartheid et les Noirs animés de sentiments de vengeance. C’était un partisan à tout crin du combat pacifiste contre l’apartheid, qui a notamment dirigé la commission vérité et réconciliation créée par Mandela. Tout cela pour dire que le succès du combat de Mandela vient aussi des sacrifices héroïques consentis par ces hommes et femmes. »

Mandela : à l’ANC les repères semblent se perdre

crédit photo: bdlive.co.za
Crédit photo : bdlive.co.za

Pour le blogueur Seydou, la cohésion sociale et la tolérance, les très chères valeurs de Mandela ne sont plus visiblement le mot d’ordre de l’ANC.

« L’ancien président sud-africain Nelson Mandela dont le nom du clan tribal est « Madiba », mort jeudi, était un symbole politique dans le pays et à l’étranger. Il a été l’un des dirigeants historiques de la lutte contre le système politique de ségrégation raciale (apartheid) avant de devenir président de la République d’Afrique du Sud de 1994 à 1999. A l’époque de la lutte contre l’apartheid, Nelson Mandela, comme ses camarades de lutte considéraient que la violence est la seule manière de régler les problèmes entre les Noirs et les Blancs. Mais finalement le leader Madiba a compris qu’il faut de la tolérance au sein du peuple et renoncer à la vengeance  pour un bon développement du pays. Il disait ceci « Etre libre, ce n’est pas seulement se débarrasser de ses chaînes ; c’est vivre d’une façon qui respecte et renforce la liberté des autres ». « Aucun de nous, en agissant seul, ne peut atteindre le succès ».

Son parti l’ANC (Congrès National Africain) est toujours au pouvoir, mais le cœur et l’esprit n’y sont plus. La liberté, arrachée de haute main par Nelson Mandela et ses compagnons de lutte, se révèle un héritage malmené. De nos jours les dirigeants africains une fois au pouvoir, trahissent les militants et les valeurs de leur parti par la corruption et le favoritisme. Ce qui mène à des violences. Quel avenir pour l’ANC et le peuple sud-africain après Nelson Mandela ? »

 

Mandela : un parcours qui doit servir de leçon

crédit photo: libération.fr
crédit photo: libération.fr

Le blogueur Boubacar s’adjoindra à la blogueuse Nora pour dire qu’après tout, la mort de Mandela, doit servir de leçon à la génération actuelle et aux leaders politiques africains en particulier.

« Aujourd’hui, partout on pleure Mandela. Sur le continent africain, les présidents dans leur hommage y vont d’un éloge à faire pleurer. Mais la question qui se pose est de savoir ce qu’ils font de l’héritage que Mandela leur a légué. Sans complaisance je dirai : Zéro! Dans leurs discours, ils parlent de paix, de réconciliation nationale, de démocratie tout en les massacrant dans leur comportement de chaque jour. Et l’éditorialiste, Adam Thiam, dit tout : « …Mandela est mort, presque centenaire. Comme s’il ne pouvait ou ne voulait plus subir la énième humiliation que lui infligeait le continent pour lequel il se battit tant à Bangui. L’Afrique tirant sur l’Afrique, débusquant ses charniers, s’étripant pour l’élection, d’accord sans honte d’être la lanterne rouge au marathon des continents. Ce Madiba-là  a raison de s’en aller. (1)»

L’histoire de Mandela doit pouvoir servir de leçon à chacun de nous ! C’est une histoire pleine de leçons de vie, que la vie nous a laissée. Ne pas en tirer le minimum pour le bien de notre continent serait de notre part aberrant. Mandela a bien évidemment fait sa part ; et toi donc citoyen lambda, que fais-tu de ces valeurs qui lui sont chères à savoir: la justice sociale, la solidarité, l’humilité, l’intégrité,  le courage, l’endurance, la sagesse etc ? Que fais tu de ces valeurs dans ton comportement quotidien ? Célébrer Mandela est chose bonne, mais je souhaite avant tout que tu impactes ton environnement immédiat comme il l’a fait! Leaders politiques africains, je vous encourage à entrer dans l’histoire en marchant sur les pas de Mandela. Aimez vos peuples ; facilitez l’alternance ; favorisez la démocratie ; enracinez la justice sociale …. ! Devenez vous aussi des hommes hors pair, car c’est ce que nous attendons de vous . Toi jeune Africain, fait tienne l’héritage de Mandela ! Sois un modèle, sois un repère ! Sois un « Mandela » dans ta communauté ! Ne cherche pas à lui ressembler pour la forme, mais engage-toi avec conviction pour  la bonne cause !  inspire-toi de ce grand homme et devient un acteur du changement positif avec un amour pour l’humanité arc en ciel ! »

 1-    Adam Thiam, In Memoriam : Mandela la fierté et l’honneur de son temps, Arawanexpress

 

 

 

 

 


Pourquoi la réconciliation ne saurait être un décret mais un processus?

crédit image: rnv.nl
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Dans mes idées de produire un article sur la paix, l’idée m’est venu de laisser parler un de mes lecteurs sur la question! En fait, il n’est pas simplement un lecteur fidèle de ce blog, mais avant tout un compatriote, un frère et un ami, que je nomme Malick. Ici il nous propose sa réflexion sur la réconciliation comme processus puis un regard sur le service militaire comme moyen intéressant de faciliter les relations civile-militaires . Bonne lecture à vous et coucou spécial à Malick pour sa contribution…

« Depuis les indépendances, le continent africain est entré dans une interminable spirale de conflits armés qui ont décimé des millions de vies. Il y a eu certes des conflits inter-états pour le control de territoires convoités et de zones frontalières (Maroc/Sahara Occidental ; Libye/Tchad) ; mais en majorité,  les conflits armés en Afrique ont été des guerres civiles à caractère sécessionniste (Casamance au Sénégal, Biafra au Nigeria, Katanga au Congo, Azawad au Mali…) ; et aussi des guerres de conquête de pouvoir par des groupes rebelles (Angola, Libéria, sierra Léone, Congo-Brazza, Congo-Kinshasa, Côte D’Ivoire…). Le génocide rwandais de 1994 (800.000 morts en 100 jours) ne saurait même être classé dans toutes ces catégories. Cependant, un des dénominateurs communs de toutes ces guerres « intra-états », c’est que chacune a opposé des citoyens d’une même nation, des compatriotes, des voisins. Lendu contre Hema en RDC. Hutu contre Tutsi au Rwanda. Dioula contre Bété en Côte d’Ivoire…etc.

Aujourd’hui, la plupart de ces belligérances ont certes connu une relative accalmie, mais sommes-nous sortis de l’auberge ? Sommes-nous à l’abri d’une éventuelle récidive ? Qui sait ?… dans 20 ans, 40 ans, 50 ans ?… (considérant le fait que le génocide rwandais de 94 était le troisième du genre dans l’histoire de ce pays). Le Rwanda est-il réconcilié ? La cote d’Ivoire est-elle réconciliée ?    Nos nations sont-elles intégrées ? Nos peuples se reconnaissent-ils dans nos Forces Armées ? Avons-nous pardonné ? Avons-nous oublié ?…   

Ma réponse à moi est « non ! »

Pardonner, certes, il le faut. Mais oublier, non, loin s’en faut. « Ceux qui ne se souviennent pas du passé sont condamnés à le revivre » disait le philosophe espagnol Georges Santayana.  

Réconcilier des peuples voisins qui se sont entretués à grande échelle est un processus qui prend beaucoup de temps. Et ce ne sont ni les gouvernements d’Union nationale, ni les Commissions Vérité-Réconciliation, ni les cérémonies de libations, ni les rituels d’incinération d’armes qui précipiteront l’intégration nationale. Les experts en psychiatrie transculturelle distinguent au moins six étapes dans la progression d’une situation de conflit ethnique à un état d’intégration ethnique[1].

Le Conflit est caractérisé, évidemment, par la haine, l’hostilité ouverte et le désir ardent d’exterminer autrui. A la fin du conflit vient, la Coexistence : un calme précaire. Une haine muette chargée de ressentiments où l’on est prêt à reprendre la guerre, à tout moment. Ensuite, vient la Collaboration : ici, il y a toujours méfiance et ambivalence, mais la guerre n’est plus une option désirable. Puis, vient l’étape de la Coopération ; et je parle là d’une coopération réellement bilatérale, pas du diktat que nous impose l’Occident. Ici, on fait affaires. Une guerre serait vraiment regrettable. On reste prudent – comme dans toute situation d’affaires – mais on éprouve une réelle sympathie pour l’autre. Vient maintenant l’Interdépendance : nous sommes différents, mais nous avons besoin les uns des autres pour mieux vivre. Nous acceptons notre tumultueux passé lointain, mais nous le laissons là où il est : dans le passé. Nous nous faisons modérément confiance. C’est alors qu’advient l’Intégration : We are One !

crédit photo: google
crédit photo: google

La réconciliation ne se décrète pas. Elle advient étape par étape. Comme une plaie qui guérit, elle prend du temps.

Cependant, l’on peut – l’on devrait ! – s’entourer des meilleures conditions et des institutions pouvant favoriser cette intégration. Il va sans dire que la classe gouvernante devrait être dotée d’une sérieuse volonté politique d’unifier le peuple (Le malheur chez nous, c’est que bien souvent, les gouvernants sont à la fois juges et parties). Des gouvernements forts et des institutions fortes (Justice, police, Armée notamment) sont nécessaires pour atténuer et dissuader les élans guerroyeurs de nos peuples.

Le service militaire obligatoire, un moyen de réconcilier l’armée et le peuple!

Et si un gouvernement veut réellement réconcilier son peuple et son armée, quoi de plus simple : Faites du peuple et de l’Armée une seule et même entité. Fusionnez-les ! Cela s’appelle le service militaire obligatoire. Cette formule naturelle a fait ses preuves depuis les temps bibliques jusqu’à nos jours. De tous les temps, le peuple a toujours été l’intarissable réservoir duquel on puise les ressources humaines de l’Armée. Il est inconcevable qu’on en soit arrivé à une situation où ce même peuple devienne la victime de l’Armée. Pour éviter cet état de fait, le service militaire obligatoire me semble être le meilleur remède. Les nations où ce service a été instauré sont des nations intégrées, ou du moins qui ont développé le long des années, une forte conscience nationale : Israël, USA, France… Certes, en France et aux USA, la conscription et le draft ont été abolis, mais ils ont déjà fait  leurs impacts positifs sur ces nations.

Mettez tous les jeunes gens de 18 ans d’une même nation dans un dur programme annuel d’éducation civique, morale, spirituelle et physique. Inculquez-leur toutes les bonnes valeurs chères à votre nation. Et à la fin, donnez-leur l’option de se faire enrôler dans l’Armée régulière ou de retourner à leur vie civile avec la possibilité d’être rappeler en cas de besoin.  En l’espace d’une génération vous aurez un peuple intégré, une nation épurée du virus de l’épuration ethnique. »

  

    



[1] Carlos E. Sluzki (2003): The pathway toward coexistence. Chayes and M. Minow, Eds.:

Imagine Coexistence: Restoring Humanity after Violent Ethnic Conflict. San Francisco, Jossey-Bass.